chap 4

Prématurité de l'infans en rapport au langage

vers chap 3 - chap 5

 

A) La Diachronie du Langage :

   Si la pulsion se définit par les propriétés d'un sphincter et de son objet, au cours de la croissance du corps humain, la voix présente une caractéristique remarquable. Dans le cas du sphincter qui produit la voix, des conditions sont différemment remplies selon les âges de la vie. Une catégorie spécifique de phonèmes, ceux que l'on appelle voyelles orales (c.a.d: non nasalisées), n'existent ni comme produit du petit enfant (on l'appelle alors infans) ni par conséquent au titre de ce qui permet à la projection corticale du sphincter d'acquérir une représentativité d'orifice lui permettant d'obtenir conscience de l'autre.

   L'inaptitude à produire ces phonèmes résulte d'une position du larynx qui s'embouche dans la cavité nasale, organisation que le nouveau-né partage avec les primates. Plus tard dans l'évolution - et dans la vie humaine suivant la loi de phylogenèse - le larynx descend de la position haute, ouvrant ainsi ce qu'on appelle une cavité laryngée. Ce n'est qu'à partir de ce moment que la personne humaine peut produire le formant qui se module en voyelles.

Primate & Humain Nouveau-né

Tête & Cou Humain Adulte

Vert: cavité nasale
Bleu : cavité orale
Mauve : larynx

Rouge : cavité laryngée - le son réel qui s'y condense s'appelle formant


   Par conséquent l'infans, dépourvu d'un sphincter par rapport à ses semblables généralement plus âgés, ne saura leur correspondre ; d'autant plus que le langage déjà l'appelle et que c'est en sa voix précisément qu'il manque un objet qui va devenir essentiel.

Voir une page très explicative de ce que je décris ici, trouvée dans le cache du moteur Google, mais qui a disparu du site universitaire où je l'attendais, et dont les illustrations manquent par conséquent. La lecture du texte est néanmoins assez claire pour soutenir le schéma que je propose.

 

B) L'Aphasie de la Prématurité :

   Rapporté à la phénoménologie de la projection corticale des sphincters (voir chap précédent), nous constatons que durant les premiers mois de sa vie, le cortex humain est incapable de traiter la projection du sphincter naso-laryngé (puisqu'il n'est pas encore ouvert anatomiquement) et que par conséquent il ne saurait en répondre d'une pulsion dont ici l'objet, toi-pour-moi, effet du formant des voyelles :

   Cette prématurité néanmoins le met en déséquilibre dans sa relation à l'adulte qui dès lors établit sa demande à partir de l'objet formant : à l'appel de celui ou celle qui le porte, le sujet qui s'image à l'huis se porte - mais tant qu'à ce qu'il ne porte rien si de sphincter il n'a, lui, ne sachant répondre d'aucune sorte, il ne sort que l'a vide, comme l'insensé que le Tout a pour moi. Il résulte ainsi de l'organisation neuro-anatomique, que l'infans est sourd (et/ou aphasique) au son qu'il ne peut produire ; observation qui corrobore celle de Lacan notant que le père primitif (de la horde selon Freud et sa thèse du meurtre du père) devait être aphasique.

Le sort des voyelles o, u, a..

   Évidemment, ça ne reste pas longtemps comme ça,

 

copirate William Théaux 20020811

 


APPENDIX :

La voix des ombres de La Caverne - extrait de La République, de Platon ; on admettra que la tradition réputée des humains d'avoir vécu dans des cavernes les aura fait méditer longuement sur les phénomènes de condensation acoustique que l'on observe dans certains concavités (où une voix prononcée à distance s'entend, à un endroit précis de ladite concavité, comme si le locuteur était proche de qq centimètres. On trouve encore cela dans les expériences amusantes des musées des sciences ; toutefois Platon, ci-dessous rapporté, mentionne la réflexion directe (l'écho) et sa capacité (autant que de sons réels) à suggérer l'âme des ombres (ci-dessous en jaune).

   "" Maintenant, repris-je, représente-toi de la façon que voici 1'état de nove nature relativement à l'instruction et à 1'ignorance. Figure-toi des hommes dans une demeure souterraine, en forme de caverne, ayant sur toute sa largeur une entrée ouverte à la lumière ; ces hommes sont là depuis leur enfance, les jambes et le cou enchaînés, de sorte qu'ils ne peuvent bouger ni voir ailleurs que devant eux, la chaîne les empêchant de tourner la tête; la lumière leur vient d'un feu allumé sur une hauteur, au loin derrière eux; entre le feu et les prisonniers passe une route élevée : imagine que le long de cette route est construit un petit mur, pareil aux cloisons que les montreurs de marionnettes dressent devant eux, et au-dessus desquelles ils font voir leurs merveilles.

- Je vois cela, dit-il.

   Figure-toi maintenant le long de ce petit mur des hommes portant des objets de toute sorte, qui dépassent le mur, et des statuettes d'hommes et d'animaux, en pierre, en bois, et en toute espèce de matière; naturellement, parmi ces porteurs, les uns parlent et les autres se taisent.

- Voilà, s'écria-t-il, un étrange tableau et d'étranges prisonniers.

   Ils nous ressemblent"', répondis-je; et d'abord, penses-tu que dans une telle situation ils aient jamais vu autre chose d' eux-mêmes et de leurs voisins que les ombres projetées par le feu sur la paroi de la caverne qui leur fait face ?

- Et comment ? observa-t-il, s'ils sont forcés de rester la tête immobile durant toute leur vie ?

   Et pour les objets qui défilent, n'en est-il pas de même ? - Sans contredit.

   Si donc ils pouvaient s'entretenir ensemble ne penses-tu pas qu'ils prendraient pour des objets réels les ombres qu'ils verraient?

- Il y a nécessité.

   Et si la paroi du fond de la prison avait un écho, chaque fois que l'un des porteurs parlerait, croiraient-ils entendre autre chose que l'ombre qui passerait devant eux ?

- Non, par Zeus, dit-il.

   Assurément, repris-je, de tels hommes n'attribueront de réalité qu'aux ombres des objets fabriqués.

- C'est de toute nécessité.

   Considère maintenant ce qui leur arrivera naturellement si on les délivre de leurs chaînes et qu'on les guérisse de leur ignorance. Qu'on détache l'un de ces prisonniers, qu'on le force à se dresser immédiatement, à tourner le cou, à marcher, à lever les yeux vers la lumière : en faisant tous ces mouvements il souffrira, et l'éblouissement l'empêchera de distinguer ces objets dont tout à l'heure il voyait les ombres. Que crois-tu donc qu'il répondra si quelqu'un lui vient dire qu'il n'a vu jusqu'alors que de vains fantômes, mais qu'à présent, plus prés de la réalité et tourné vers des objets plus réels, il voit plus juste ? si, enfin, en lui montrant chacune des choses qui passent, on l'oblige, à force de questions, à dire ce que c'est ? Ne penses-tu pas qu'il sera embarrassé, et que les ombres qu'il voyait tout à l'heure lui paraîtront plus vraies que les objets qu'on lui montre maintenant ?

- Beaucoup plus vraies, reconnut-il.

   Et si on le force à regarder la lumière elle-même, ses yeux n'en seront-ils pas blessés ? n'en fuira-t-il pas la vue pour retourner aux choses qu'il peut regarder, et ne croira-t-il pas que ces dernières sont réellement plus distinctes que celles qu'on lui montre ?

- Assurément.

   Et si, repris-je, on l'arrache de sa caverne par force, qu'on lui fasse gravir la montée rude et escarpée, et qu'on ne le lâche pas avant de l'avoir traîné jusqu'à la lumière du soleil, ne souffrira-t-il pas vivement, et ne se plaindra-t-il pas de ces violences ? Et lorsqu'il sera parvenu à la lumière, pourra-t-il, les yeux tout éblouis par son éclat, distinguer une seule des choses que maintenant nous appelons vraies ?

- Il ne le pourra pas, répondit-il ; du moins dès l'abord.

   Il aura, je pense, besoin d'habitude pour voir les objets de la région supérieure. D'abord ce seront les ombres qu'il distinguera le plus facilement, puis les images des hommes et des autres objets qui se reflètent dans les eaux, ensuite les objets eux-mêmes. Après cela, il pourra, affrontant la clarté des astres et de la lune, contempler plus facilement pendant la nuit les corps célestes et le ciel lui-même, que pendant le jour le soleil et sa lumière.

- Sans doute.

   A la fin, j'imagine, ce sera le soleil - non ses vaines images réfléchies dans les eaux ou en quelque autre endroit - mais le soleil lui-même à sa vraie place, qu'il pourra voir et contempler tel qu'il est.