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ANTICHAMBRE GALERIE SAINT DESSEIN
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table

part I Antichambre
Chap.2
Jeu de Force

présentation

archive-20220831

 

 

 

 

   L'unique et large fenêtre offre au spectateur un paysage uniforme couleur gris-bleu et blanc, de béton et neige. Une étendue gelée, parfaitement plane emplit le fond d'un fjord ou d'un lac. S'il y avait des arbres sur les versants neigeux on dirait la Norvège. Mais il n'y a plus d'arbres ou il n'y en a jamais eu - le site est entièrement géométrisé par la main de l'homme - ou par une autre espèce géométrale. Face à ce spectacle, la fenêtre ferme une grande pièce tempérée. Chercheurs assis autour d'une table, longue et sans fioriture d'où ils ont la vue (sis la Vue du STAF) ; ils sont en nombre, seize (des fois jusqu'à trente). On les appelle ingénieurs. "On" c'est le STAF - un Système Transitif Autre Fonction - une agence destinée à la conduite des transformations, ici du genre humain, là de son environnement. C'est intégral et dit "transitif" parce que ses membres sont tous égaux. Les transformations aussi sont égales - et c’est la clé. Ce sont effectivement des 'ingénieurs' ; ils sont anonymes et une amorphose les rend indistincts les uns pour les autres. Ce tas de formes humaines à cette époque, contrôle la transition de la fonction par la fiction, qui sera la découverte majeure de l'ère de la transformation ; l'étonnante science fiction devint une analogue science fonction (10) au moment de la création du STAF.

 

 

 

   Chaque ingénieur a posé devant lui sur la table son nam à couverture cuir. Ces carnets, identiques à celui de Neiwer sur un autre continent, sont des améliorations du fameux  fam (15) qu'on employa parfois en réalité. Les fams étaient plantés dans le corps et ne communiquaient pas ; par contre chaque ingénieur avec son nam communique avec son doublon. En résumé, les caractéristiques du laboratoire sont les suivantes : une pièce et une baie, avec une grande table entourée d'une vingtaine d'ingénieurs tous semblables, muni d'un nam chacun connecté à son doublon ; s'y ajoute une messagerie générale signalée par deux fentes identiques : l'une en bout de table et l'autre au mur opposé à la fenêtre. Dix centimètres de large chacune, pour des languettes qu'on tire à disposition ou à la conduite du STAF. Ce matin ressemble à tous les matins. Depuis un long moment les ingénieurs travaillent silencieusement ; mais une onde de mouvement se dessine ; finalement une voix s'élève.

 -- Neiwer a écrit une chose étrange »
   L'amorphose de l'ingénieur qui a parlé montre une perturbation : il paraît passagèrement paré de lunettes rondes. À l'ouverture de son nam alerté par son clignotement, il a constaté une nouvelle écriture apparue. Il déclare à l'assemblée qu'un certain Neiwer (son doublon qui en use à l'avers) a écrit :  « le mot barré "  plat  " suivi du signe "  S°°
». L'ingénieur hésite à commenter au milieu de ses collègues stupéfaits. Sa poursuite ne lave pas les soupçons :
 -- Il n'est pas prévu que mon doublon emploie jamais la calligraphie des Aristos ! bégaie-t-il. On dirait qu'il cherche à se disculper ou à disculper l'autre - et les autres le regardent toujours muets, sans signe d'hostilité, mais rien non plus qui soit rassurant. On se méfie toujours quand un doublon parle de son doublon.

 -- Quel délai entre les deux inscriptions ? » au bout d'un moment demande l'un deux tous.
 -- Quelques secondes » répond le premier, vérification faite de son nam en télémoire - puis il commente après un moment « C'est trop long pour être la même phrase. Ou alors il est perturbé
» constate-t-il.
 -- Vous avez son emploi du temps ? » questionne une voix venue du bout de table. Le premier ingénieur titille en se démenant
les onglets, il brasse les applis et fige. Ce temps durant il a pris au ralenti la forme de son dossier jusqu'à ce que son amorphose dessine en cireux traits l'expression d'honte.
 -- Il est sorti de l'université Mitoy, et passé le bar du Bossphore..
il est ivre ! » Étranglé par l'effort mais parvenu à dire, il s'excuse d'un long soupir (qui se poursuit en un long ohhhhhh... de l'assemblée). Il précise en regardant au loin par la fenêtre : « Complètement saoul » 

   Un paroxysme émotionnel menace ; tous suent et on dirait que ça fume. L'ingénieur du bout de table se lève raide. Quand il se lève, c'est le signe d'une fin de tour ; et tous suivent en se mettant en mouvement. Maintenant tous debout se remuent, errent et s'aèrent ; le bout de table se déraidit et se mêle aux autres confondus ; bientôt le groupe en tas bout et bouillonnent tous semblables et de manière hasardeuse en soufflant. Aucune chaise n'est plus occupée ; la salle est occupée de conversabruit. En cette masse mue les formes indistinctes s'agitant sur leurs pieds se mêlent comme des photos brouillées de mouvements trop rapides. Puis un moment mort venu, une voix par quel hasard sortie du flou dit : « Il reste encore du temps d'un tour !. » Chacun revient à une place toujours par hasard. Une nouvelle amorphose se fixe sur un modèle unique. À la table seul un nombre - à présent seize - qualifie ses seize semblables. « Ltourprenltour » prononce le bout de table.

   Tous les ingénieurs étant par ailleurs identiques les uns aux autres, durant les séances les amorphoses sont achevées à tort ou à raison, n'étant ainsi ni moralisation ni démoralisation. Peut être y a-t-il une directive occulte mais pour chacun il reste impossible de savoir quelle serait sa place ou la forme tant de la directive que de la direction. L'ensemble n'est ainsi sérialisé qu'à partir d'une place distinctive, celle du bout (de table).
   Elle y vient au hasard, c'est toujours le dernier assis. C'est elle qui déclare la fin des séances. Un autre facteur toutefois ordonne une permanence : chaque ingénieur garde son nam, sur la table posé devant lui, couvercle généralement rabattu. Il est par conséquent tenu à une permanence sur son doublon, supposé de son côté invariable mais active. Du hasard à cette doublure "fixactive" la liaison aura été mise au point par le troisième Fraude. Mais c'est Fraude Premier qui l'a inspirée. Il en traçait l'esquisse dans les premières lois de l'Information qui prenaient corps - précisant que « ce n'était pas des ' lois ' linguistiques mais les ' lois ' mathématiques des statistiques, » comme Neiwer n'allait pas se priver de le rappeler. Neiwer fut un temps partie d'un équipage doublon, d'ingénieurs attachés au principe de palpation par fiction des lois naturelles. De son bord (Phyzik), il estime que la palpation par fiction (mesurable d'un physiocc ) se calculera par sa cybernétique. Personne ne comprenait ce que ça voulait dire, mais personne ne le disait - pourtant par le nam l'un l'autre doublon de Niewer suivait.


   Il ont donc repris place à table chacun trouvant pareil à plat sa table. Dehors, dans le pays vallonné glacé, tout se déplace d'une activité fourmilière, des véhicules sur le paysage et sur les flancs. Attentif on y reconnaît des usines ou des laboratoires, fondues avec les rocs et le falaises blanchis à la neige. Mais l'attention est ramenée par je de forces à l'ambiance interne. La session reprit en silence. Le choc a été rude : l'emploi du barré  ( ci-dessus du  plat  ) a été signalé sur le bord d'un doublon ; cette calligraphie n'est plus d'usage dans un STAF
(étiquette de rappel : Système Transitif Autre Fonction). Le barrage - comme  ça  - y est un barbarisme. Ça ne s'usite plus qu'aux collèges académiciens ! Le silence se prolonge comme s'il introduisait le froid glacial du dehors à l'intérieur - jusqu'à ce que la fente du mur (opposé à la baie) émette un papier qui tremblote avec un raclement. Le plus proche se lève. Il tire la languette issue. En l'arrachant on dirait qu'il faire aïe! Sec il ferraille et lit d'une vouamorphe métallisée une directive à l'adresse du groupe : " Il nous faut travailler avec plus de précision."

 -- C'est un message signé du Président Jöed Forss : » a annoncé l'ingénieur revenant vite à sa place. Il continue : « À partir de maintenant nous devrons, je cite " correspondre en fonction d'une nouvelle désignation des deux de trois. Pour réaliser ce jeu de chiffre, les nominations " Aristotelliciens " et " non-Aristotelliciens " sont obsolètes ; de même la prononciation " non-A " - qu'on écrit - ou l'emploi de l' A barré  - écrit  -  n'ayant plus cours (sauf en référence historique ou technique). Pour les mentionner nous emploierons simplement les termes : " AnA " et " ApA . " Voilà.. c'est tout ce qu'il y a d'écrit. J'ai tout décrit. En deux mots c'est : AnA c'est  et " ApA c'est  »

 -- C'est court ! » jappe une voix « Après trois siècles au travail pour comprendre que deux de trois c'était le couple dans la scène primitive triplex ! Cette fois on a "deux mots"! » - « c'est court.. » répète-t-il en montrant des crocs amorphes.
 -- Deux fois deux mots » précise le premier.
 -- Est-ce que quelqu'un a une idée de ce que ça veut dire ? » demande quelqu'un qui l'ignore.
 -- Oui, c'est assez simple » répond un autre, répétiteur, « l'AnA doit correspondre à l'ancien usage du non-A qu'on appelait aussi l'A-null. Cette désignation ayant été contestée - car on pouvait la confondre avec le barré qu'on appelait aussi l'A-pas - on aura donc maintenant un A-non-A et un A-pas-A - les AnA et les ApA. C'est nettement insistant et c'est plus simple. » et il répéta en se levant ce que vient de dire le Président : «  Nous c'est les AnA donc les autres c'est les ApA.
 -- C'est plus simple
» approuve en se moquant un autre en rigolant : « les AnA, nous, c'est le STAF d'Aristotelliciens-non-Aristotelliciens
Aristotelliciens  - il n'y en a pas d'autres comme nous, et d'AnA n'a ! ah! ah! 
 -- Mais ça change tout le temps » trépigne celui qui aboyait. 
 -- Je dirai même plus. Les autres c'est les ApA. C'est les Aristotelliciens-pas-Aristotelliciens
Aristotelliciens  - , ce qui veut dire qu'il y en encre a d'autres : des Aristotelliciens. » dit encore un autre
 -- Sans oublier qu'il n'y a que les Aristos qui les écrivent comme ça. » réprécisa le rigolo qui ne se lassait pas de remuer mais à présent sérieusement. Ça commençait à sentir la confusion.
 -- Est-ce qu'au vote on comprend tous ça ? » toussa la voie du bout de table pressée de faire passer l'agitation.
   Les mains s'élèvent en faisant des papillons tout autour de la table. Le temps de compter. C'est adopté. Un silence retombe, rompu par le même bout de table qui déclare : « Nous sommes Ana » ; il est alors rapidement suivi par la voix de quelqu'un :

 -- Puisque sous la présidence de notre jeu de force, il n'y a pas de coïncidence qu'on laissera hasardeuse..» Elle est interrompue :
 -- Dites tout de suite que les coïncidences sont ApA ! » interjette une voix pas tout à fait calmée.
 -- Si vous voulez, mais je ne le disais pas comme ça ! » tempère la première. «..je disais que même s'il n'y en a pas... nous, en ana, devons traiter l'incident préalable par la nouvelle dénomination. Donc même s'il l'avait précédé on redira que pour commencer, un doublon écrivit comme un Aristo, en barrant.
 -- .. Et que deuxièmement Joëd Forss a précisé nos dénominations... on ne barre plus, on dit " ApA " » compléta son voisin
 -- Ou bien quelqu'un - d'autre - s'est servi de son carnet pour y inscrire un usage ApA » acheva le voisin suivant. On sentait que quelque chose avait changé.
   Après un silence, la voie de bout de table prononce : « Tel est le problème.»

   On voit que les ingénieurs mènent une vie douloureuse malgré leur confort, la pièce chauffée et leur expertise dans le tout-arranger. La frustration commence dans le langage que personne ne comprend qu'eux à peine. Elle s'aggrave quand on - cherchant à comprendre - trouve que c'est simple. On se trouve honteux. C'est la loi du petit effort et le plus-simple-qu'il-n'y-parait repousse les doutes en soupçon. La lecture de la nature devient un jeu d'enfant, mais qui n'est plus innocent - ce que l'ingénieur commun, s'il n'est pas savant, ressent commune accusation. Tous en sont dépités qui s'assemblent et sa lecture en devient jeu de force. Doux le Président Jöed Forss mais de là que quête un chef, la foule d'une mythologie populaire y introduit la poule, qui trouve un clou.
   L'expérience le prouva en effet sous la forme d'un intrus trou :

 -- D'une manière ou d'une autre, il y a infiltration » commence un ingénieur
 -- Est-ce qu'on n'en sait pluss sur le doublon ?!  » dit un autre
 -- C'est suivi du signe "S°°" qui indique forcément la loi de contradiction foncière du placebo ; déjà que le Semblant,
"", à lui seul y joue. » dit un autre
 -- Il n'y a que par les statistiques qu'elle peut être introduite » dit un autre
 -- Alors c'est un message du statisticien, qui nous avertit que quelqu'un corrompit son nam - ou bien c'est un Aristo qui vire à l'AnA » dit encore un autre
 -- C'est impossible que ce soit un Aristo puisqu'il a un carnet » en encore
 -- Il n'y a que des AnA qui peuvent s'incarner » ça continue
 -- Donc c'est une intrusion étrangère dans le nam du doublon »
   Ça n'arrête pas.. les ingénieurs tour à tour se prononcent formant une tablée pépiante, bourdonnante, bouillonnante, tourbillonnante, tous autour du motif du sacro-saint carnet.
 -- La question revient donc à la statistique qui permettra ce transfuge » reprend une voie.
 -- Ce n'est certainement pas un transfert, puisqu'il y a eu réponse AnA.. » réplique immédiatement une autre
 -- Ce n'est pas encore une transformation, nous serions à présent avertis. » s'élève un autre, très
ingénieur de Système de Transformation
 -- Oui mais l'autre était saoul.. » dit... et il est enfin interrompu par l'assemblée murmurant un long ohhhhhh...
   Une rumeur assourdit l'ensemble et décroît quand un climat de honte généralisé atteint tous les morphings - le brain-storming s'étale et la table est plongée dans un silence méditatif. Longtemps. Alors à commencer par le bout de table, ils se lèvent et sortent tour à tour sans dire un mot. Sentiment d'échec pour ne pas dire d'indéfinissable menace. Un doublon doublé, déjà ... vous pensez !.. mais que livre l'ivre ?

 

L e   L E N D E M A I N  au  J A R D I N

   Dans le Jardin Froid de la Cité des Fictions, un homme et une femme déambulent emmitouflés. Ils apparaissent être des ingénieurs se remémorant la session de la veille. La femme dit :
 -- Personne n'a plus rien dit après l'annonce d'un transfuge.» Sa démarche posée, ses yeux et sa voix composés indiquent la soixantaine. Elle marque un intérêt certain pour les cristaux de neige cultivés. Certains peuvent atteindre des tailles énormes, plus gros qu'une fleur végétale, mais la plupart minuscules restent observables à l'aide de loupes grossissantes nombreuses et plantées comme d'autres fleurs dans le jardin.
 -- D'habitude il y a plus d'enthousiasme. Mais c'est un transfuge ou un dédoublement ? » dit l'homme. Lui, ses mouvements sont plus rapides et légers. Il est probablement plus jeune mais pas moins couvert pour se protéger du froid ardent malgré tout. Il n'est pas autrement identifiable qu'il tient en ses gants un nam de cuir ; pourtant il ne prend pas de notes comme on s'y attendrait d'un visiteur au Jardin flocanique.
 -- C'est parce que l'intrus ou le nouveau venu est moins important que la statistique qui lui a donné le moyen d'entrer ; le problème est moins parlant que l'identification d'une personne.» La femme qui a prononcé cela distraitement regarde maintenant le ciel, peut-être pour vérifier si la barrière de nuage est correctement déviée. Son geste trahit sa fonction technicienne dans la base : elle est automatiquement dans les nuages, comme toute météorologue dans ses pensées. « Si quelqu'un a trouvé la jointure statistique qui permet un passage chiffré de l'ApA à l'AnA, nous avons réalisé un progrès gigantesque. La personne s'efface derrière la découverte.
 -- Durant chaque session nous en faisons l'expérience pratique avec le démorphing » raccourcit son interlocuteur  « telle est bien l'abnégation des nulls.
  
C'est un réconfort mais dans le Jardin Froid l'ingénieuse fait les mouvements plus brusques d'un agacement contre la suffisance « Jusqu'à preuve du contraire nous avons au mieux assuré une psychohistoire inapplicable. C'est une abnégation molle et les ApA gravitent toujours autour du placebo. Certains propagandistes s'aventurent jusqu'à l'alibi. Ces traitements primitifs de la négation dépensent une énergie énorme, et la société planétaire est impuissante à vraiment traiter ce qu'elle ne sait pas.» On ne sait si elle transmet sa patience ou son désespoir. Son jeune collègue écoute « Nous ne pouvons plus compter sur notre vieille méthode, nos syndicats, nos révolutions ; même Jöed Forss y renonce ; il ne croit plus qu'en la modernité. Seulement voilà... ou bien c'est une fuite en avant » il hoche « ou bien nous sommes en attente d'une équation qui ne vient pas. L'inapplicabilité de la psychohistoire n'est plus une ressource », il opine « Il nous faut véritablement remonter à la source mathématique de la psychohistoire, à ses composantes statistiques, et trouver celles qui peuvent être recomposées pour donner enfin la fibre du passage.»
 -- On s'embrouille tout de même avec ses changements terminologiques. Ce n'est déjà pas facile avec un seul nom » tacle le jeune homme en remplissant un arrosoir à flocon, révélant être le jardinier, ingénieur de neige sexangulaire.
 -- Ce serait pire si on ne bougeait pas la langue » insiste-t-elle « Dans le phyzik il n'y a plus de personnes citoyennes. L'être humain devient consommateur. C'est un paloécitoyen " forme hâtée " disait notre Président
(20) avant Jöed. Il reste des mitoyens qui s'enivrent. Il est nécessaire que la langue anticipe, sinon nous nous prenons toujours pour des citoyens libres empâtés. Complexe ApA typique ! » conclue-t-elle énervée « Vive la révolution terminologique ! 

 

   Le jardinier mesure avec son G-glass la taille d'un spécimen surdimensionné de flocon. Sa main libre montre des doigts qui s'agitent incessamment en caressant le carnet. La femme en l'observant suspecte que ce soit l'homme du doublon du tour de la veille. Elle se tait en songeant qu'elle en aura d'autant plus à dire. Comme s'il cherchait à renforcer cette intuition, il poursuit en avant : « Le doublon qui a montré le comportement déplorable d'hier est susceptible d'être impliqué dans cette statistique. Ce doit être un statisticien. Peut-être a-t-il été victime, drogué à son insu. Aurait-il eu juste le temps de signer " S°° " et voulu nous avertir qu'il avait découvert une statistique contrôlable dans la loi de l'opinion ? »
 -- C'est facile à dire » répond la femme ingénieur « mais son comportement - ou bien se laisser prendre à un piège grossier - n'indiquent pas une pleine capacité d'AnA. Ce ne sera pas la première fois que quelqu'un se sera attaqué au problème en y laissant sa santé, ou au minimum des plumes de sa raison.
 -- Permettez moi d'attirer votre attention sur ce cristal » interrompt le jeune homme en délaissant la conversation : « C'est une Étrenne Sextangulaire de toute beauté. Celui-ci tient de la catégorie dite "nouille". C'est en modifiant localement le champ de gravité qu'on obtient un 'ouille' surnuméraire
(70) . Cet exemple de phyzik montre qu'il doit y avoir un moyen de moduler la gravité du placebo comme d'ouvrir un passage non-Aritostellicien pour une branche surnuméraire du cristal.
 -- N'oubliez pas que l'on dit à présent AnA au lieu de " non-Aristotellicien
" » répond l'ingénieuse formelle « mais tous mes vœux accompagnent votre projet s'il est de matérialiser le placebo.»
   L'homme enregistre qu'il a une alliée rigoureuse. Elle un allié aventureux. Il se convainc qu'en redoublant ses derniers mots elle a compris que dans le nam qu'il tient tient le doublon que la veille a signalé au bord du moyen de faire passer des ApA. Pudique elle souhaite silencieusement pour sa doublure une aide du statisticien. Cependant le nam reste aussi silencieux, ni ne clignote, ni ne vibre. Ça devait être une sacré cuite. Il met du temps à s'en remettre, à moins que... Ils prolongent leur déambulation jusqu'au mur de brume puis sortent du jardin. Elle se dirige vers son département d'opération. Il la regarde s'éloigner et remplit son arrosoir.
   Aurait-il vendu son nam ?..

 

 


(10) : US = "Astounding Science Fiction " & " Analog Science Fiction "  retour
(15) : Psychohistoire en Peril / Kingsburry ; le fam était initialement une analogue clé USB implantée sous la peau mais amovible - il apparut en physique sous le nom de code "smartphoneretour
(20) : Daniel Paul Schreber : "hommes bâclés à la six-quatre-deux"  retour

      
Bateson-Père cartoon-D.G.Lillie,1909
(70) : William Bateson, fondateur du terme "génétique" (père de l'autant célèbre Grégory dans le domaine de l'écologie et de la seconde cybernétique) impressionna son fils par son étude de la symétrie des antennes surnuméraires des mutations d'insectes  retour


Bateson-Fils (selon Bateson-fils 1973)

 

 


  20140222140400

   Enregistrement vidéo du commentaire / DWT sur Lascène.Chap.2   

   suivi des notes/résumé dudit commentaire :  

   Le commentaire parlé/vidéo sur le Chap2 s'est appuyé sur le contraste entre les 2 premiers chapitre. Le précédent, Chap1, présentait (et définissait la nature d') un discours/dioscure ; celui-ci, Chap.2 expose la nature d'un pluriel. Dans le premier cas, il faut ni plus ni moins que deux semblables. Dans le second il faut un nombre indéterminé, outre que supérieur à trois, de personnages identiques. Il y est dénommé STAF. Il présente la mise en scène d'un appareil de traitement du savoir collectif.
   Dans le premier chapitre, on a trouvé Neiwer/Weiner, sujet à proposer une formule du savoir collectif et de son traitement (comme un compte-rendu numérique). Le chapitre second présente la pratique matérielle du traitement du savoir collectif (comme une compte-rendu analogique).
   Il y a donc deux scènes : l'une (Chap.1) simili Massachusets (où conversent les dioscures), l'autre (Chap.2) simili Norvège (où bourdonne le pluriel). Ces deux scènes sont du monde, ou du bord, du phyzik (il existe un autre monde mentionné physiocc que dudit Massachusetts au moins on pourrait aborder - mais à ce point on ne sait que sa constitution de fiction). Le chapitre insiste plutôt sur la structure de cet appareillage phyzik : chaque clone (le ingénieurs dans la mesure de leur similarité sont comparables à des clones) est doté d'un relation qu'il entretient en doublon. Une sorte d'engin miroir instrumente leur relation (chaque doublon en détient un appareil comme un téléphone portable, ou un talkie-walkie) ). Le STAF apparaît comme un système strictement doté et uniquement de miroir ; miroir entre les semblables, miroirs entre les doublons - il motive une allusion au Modèle Optique (et ses deux éléments miroirs, plan et courbe).


   Le commentaire a ensuite insisté sur l'avers des effets de langage dont la psychologie/psychanalyse parle beaucoup - les effets sur le langage que le traitement du savoir collectif occasionne.

   Un participant signale l'ennui que ces effets occasionnent lorsqu'il est entrepris de les formulations, voire seulement de les dénommer. Il est juste à ce titre de faire remarquer que cet ennui était déjà noté dans The Players of A  de A.E.VanVogt - traduit par B.Vian Les Joueurs du A  qui fait dire à un Janasen « La galaxie est pleine d'idées anarchiques, mais je n'ai jamais entendu dire que ces idées puissent marcher. J'ai essayé de me représenter comment ces non-artisto.. non-artos... télé... - Dites non-A suggéra Gosseyn - Comment ces trucs non-A fonctionnent ; mais cela paraît impliquer que les gens soient raisonnables, et ça, je refuse de le croire. »

   Enfin l'enquête recherche quel est le gouverneur, moteur, motif, directeur, pilote ou guide du STAF. Le roman le nomme Joëd Forss - par assonance à Jeu de Force ; "jeu de force" est un intitulé moderne de ce que la psychanalyse à ses origines (Freud) appelait à l'instar de son époque, masses en mouvements. La science n'avait pour objet, fondamentalement ou ultimement, que des "jeux de forces" ; ainsi la direction du STAF est-elle donné par le terrain de la science.